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Colloque : Colonisation animale du Nouveau Monde : géohistoire et histoire environnementale (16e-19e s.) (2024)

Publié le 4 avril 2024 Mis à jour le 4 avril 2024

Les animaux introduits par les Européens pendant la conquête et la colonisation des Amériques étaient, pour la plupart d’entre eux, inconnus des sociétés du Nouveau Monde. La chose est admise mais elle reste peu documentée. Comment ces animaux se sont-ils acclimatés à leur nouvel environnement ? Quelles relations (concurrence, complémentarité, replacement) ont-ils entretenues avec les communautés anthropozoologiques locales ? Une fois implantés, comment ces animaux se sont-ils finalement créolisés ?

Date(s)

du 22 avril 2024 au 23 avril 2024

Lieu(x)

Bâtiment Max Weber (W)

Des historiens, des anthropologues, des archéozoologues et des biogénéticiens font le pari d’y répondre en croisant leurs disciplines et en discutant des apports de leurs travaux. Ce colloque est la première rencontre du collectif AmericAnimal, qui regroupe plus d’une vingtaine de chercheurs, entre la France, le Pérou et le Mexique.

La géohistoire des animaux européen semble a priori se confondre avec l’histoire de la Conquête : un premier foyer dans la Hispaniola, une dissémination dans les autres îles (Puerto Rico, Cuba, Jamaïque) avant de se diffuser en Terre Ferme (Colombie, Panama, Nicaragua) puis au cœur de l’œcoumène des grandes civilisations et enfin dans les confins du continent américain. L’approche diffusionniste laisse à penser que l’implantation fut immédiate et l’expansion totale, irréversible. La colonisation animale des terres nouvellement découvertes serait l’illustration vivante de la réussite du projet colonial. Cette vision des choses tend néanmoins à gommer les spécificités régionales, les échecs et les adaptations micro-situées selon les espèces concernées, les configurations environnementales et leur adoption ou leur rejet par les autochtones.

Le petit bétail (ganado menor, poules, porcs, chèvres) paraît avoir prospéré dans les basses terres mais de manière très inégale car il fut chassé par certains peuples ou anéanti par les prédateurs (jaguars, pumas, coyotes) ; le mouton, à la base de l’élevage extensif de tradition ibérique, ne prend que dans les régions froides et encore doit-il s’adapter à l’altitude (hypoxie). Le grand bétail (ganado mayor, chevaux bœufs, vaches, taureaux), plus exigeant en soin et en pâture, semble avoir été plus tardif. Dans certaines régions insoumises, les domestiques européens ont été éliminés ou dérobés pour être retournés contre les colons, comme le cheval chez les Araucans du Chili ou les Dakotas au nord de la Nouvelle-Espagne, dont on sait, grâce aux analyses génétiques, qu’il fut d’abord espagnol au XVIIe siècle avant de devenir anglais au XIXe siècle. D’autres espèces furent détournées de leurs usages premiers : les poules intéressaient certains Amérindiens non pour leur viande mais pour leurs plumes.

La dimension environnementale est ici essentielle à une compréhension globale du processus. L’immensité des espaces américains et le faible encadrement des hommes ont joué dans le développement des populations animales ou au contraire dans leur disparition. Dans certaines régions, la prolifération fut telle que le milieu (paysage et écosystème) s’en trouva transfiguré : érosion, piétinement des sols, ouverture de pistes… comme sur le plateau central du Mexique, dans la Vallée du Mezquital envahie par les brebis et en voie de désertification à la fin du XVIe siècle. Dans d’autres cas, certaines espèces (poules, chiens, cochons) charrièrent des pathogènes aux conséquences démographiques encore mal mesurées, notamment dans les villes où les densités anthropozoologiques sont fortes.

La diffusion animale est, autre facette du sujet, indissociable des processus de conquête et de colonisation : les troupes de soldats qui sillonnent vallées, plateaux et montagnes sont souvent composées de chevaux et de mules porteuses mais aussi de poules en cage et, à l’arrière-garde, de troupeaux de cochons destinés à nourrir la soldatesque mais aussi à peupler les territoires découverts. Avec l’appui de la couronne espagnole, les explorateurs ont systématiquement encouragé et facilité l’implantation de souches animales. Ces « marrons » facilitèrent dans un second temps le peuplement des espaces conquis. Les animaux doivent ainsi être considérés comme des protagonistes essentiels de l’expansion territoriale ibérique au Nouveau Monde : il s’agit de pallier la faiblesse démographique européenne par l’opulence et la prolifération des troupeaux.

Les intervenants présenteront des études de cas documentées et situées du nord au sud du continent américain, des débuts de la conquête à la fin de la période coloniale. Le format de présentation est de 30 mn et illustré.
 

Programme

Lundi 22 avril

14h : accueil des participants et café

14h20 : mots introductifs

Session 1 : 14h30-19h
Présidence : Annelise Binois (archéozoologue, Université Paris 1)

Ludovic Orlando, CNRS-CAGT-Toulouse III
« Le cheval dans la colonisation des Amériques » (en visioconférence)

Aurélie Manin, Université Bordeaux, PACEA-CBMN, Muséum national d'histoire naturelle
« Chiens autochtones, chiens de guerre, compagnons ? Indices archéologiques de l'arrivée des chiens européens en Amérique ».
Pause café 16h-16h30

Ophélie Lebrasseur, CAGT-Toulouse III et INAPL-Buenos Aires
« La poule en Argentine comptée par l'archéozoologie et la paléogénomique ».

Thomas Brignon, Université Sorbonne Nouvelle,
« Poules et cochons, pionniers et perdants de la colonisation du Río de la Plata (XVIe-XVIIIe s.) ».

Jéronimo Bermúdez et Antoine Duranton, CRH-EHESS
« La transformation des campagnes de Nouvelle-Espagne par les animaux de travail et le travail des paysans ».
 
Mardi 23 avril

Session 2 : 9h30-12h
Présidence : François Regourd (historien, Université Paris Nanterre)

Aliocha Maldavsky, Université Paris Nanterre-Mondes Américains-ESNA
« Encomenderos, moutons et populations andines au XVIe siècle ».

Elfie Guyau, Université de Reims,
« Troupeaux européens et donations testamentaires de la noblesse indigène dans la vice-royauté du Pérou, XVIe-XVIIe siècles ».

Emmanuelle Pérez-Tisserrant, Toulouse 2-Jean Jaurès-Framespa
« Circulations des animaux domestiqués, colonisations rivales et collectifs intermédiaires dans le grand Ouest nord-américain, premier XIXe siècle ».
Session 3 : 14h-15h

Karine Lefebvre, UNAM-Mexique
« La colonisation pastorale dans le nord du Michoacán (XVIe siècle): un outil de la Conquête » (en visioconférence).

Mots conclusifs

Visite de la ferme du Bonheur (15h30-17h)

Partenaires :
ESNA/Mondes Américains (UMR 8168)
Format hybride : pour accéder à la visioconférence cliquer sur ce lien.

Mis à jour le 04 avril 2024